Dans la Tradition
Pape Pie IV, Concile de Trente, Sess. 25, 4 déc. 1563 : “Le pouvoir de conferer les Indulgences ayant été accordé par Jésus-Christ à l’Eglife, qui dès les premiers temps même a usé de cette puiffance , qui lui a été donnée de Dieu; Le Saint Concile ordonne et prononce qu’on doit garder et retenir dans l’Eglife l’usage des Indulgences, comme tres-falutaire au Peuple Chrétien, et approuvé par l’autorité des Saints Conciles; et condamne en même temps d’Anathème tous ceux, ou qui disent qu’elles sont inutiles, ou qui nient que l’Eglise ait la puiffance de les accorder. Il désire néanmoins, que suivant la coutume ancienne, et approuvée dans l’Eglise, on les accorde avec réserve et modération; de peur que par trop de facilité, la discipline écclésiastique ne vint à s’affoiblir.
Mais à l’égard des abus qui s’y font glissés, et à l’occasion desquels ce nom favorable d’Indulgence est blasphémé par les Hérétiques; Le Saint Concile, fouhaitant extrêmement qu’ils soient réformés, et corrigés, ordonne en général par le present Décret, que toutes recherches de profits criminels dans la distribution, soient entièrement abolis, comme ayant été la cause de plusieurs abus qui se sont répandus parmi le peuple Chrétien : Et pour tous les autres abus qui sont venus, ou de superstition, ou d’ignorance, ou d’irréverence, ou de quelque autre cause que ce soit; comme ils ne peuvent pas être aisément spécifier en détail, à cause de la grande variété de désordres, et de corruptions qui se commettent à cet égard, selon la diversité des lieux et des Provinces : Il ordonne à tous les Evêques de recueillir, chacun soigneusement dans leur Diocèse, toutes ces sortes d’abus, et d’en faire le rapport dans le premier Synode Provincial; pour, après avoir aussi été reconnus par le sentiment des autres Evêques, être incontinent renvoyés au Souverain Pontife, afin que par son autorité, et par sa prudence, il soit reglé, ce qui sera expédient à l’Eglife Univerfelle; et que par ce moyen, le trésor des Saintes Indulgences soit dispensé à tous les fidèles, avec piété, sainteté, et sans corruption.” 1
Saint Thomas d’Aquin, Somme théologique, suppl., q. 25, a. 1. : “Tous s’accordent à penser que les indulgences ont quelque valeur, parce que ce seroit une impiété de dire que l’Eglise favorise de vaines observances. Mais pourtant quelques-uns soutiennent qu’elles ne peuvent rien pour la rémission de la peine qu’il y auroit à expier en purgatoire, mais que toute leur vertu se réduit à lever l’obligation imposée au pénitent de subir une peine, soit par le prêtre, soit même par les canons.
Mais cette opinion ne nous paroît pas fondée en vérité : premièrement, parce qu’elle contredit formellement le privilège accordé à Pierre, d’obtenir que tout ce qu’il remettroit sur la terre seroit remis dans le ciel; d’où s’infère cette conséquence, que toute rémission décrétée au tribunal de l’Eglise, a sa valeur à celui de Dieu; ensuite, parce qu’autrement l’Eglise, en accordant ces indulgences, nuirait aux fidèles plus qu’elle ne les aideroit, puisqu’elle ne leur remettroit alors les pénitences qui leur auraient été enjointes, que pour qu’il leur en restât à subir de plus fortes dans le purgatoire.
C’est pourquoi il faut dire, au contraire, qu’elles ont pour effet, tant au tribunal de Dieu qu’à celui de l’Eglise, de procurer la rémission de la peine qui reste à subir à la suite de la contrition, de la confession et de l’absolution, n’importe que cette peine ait été enjointe ou non. La raison doit s’en chercher dans l’unité du corps mystique de l’Eglise, dont certains membres, et en grand nombre, font plus d’oeuvres de pénitence qu’il n’en est dû pour l’acquittement de leurs propres dettes, ou même endurent patiemment bien des tribulations injustes, qui seules suffiroient pour expier au besoin tous leurs péchés, en sorte que tous ces mérites réunis dépassent de beaucoup la peine qui leur serait due.
Mais la vertu des indulgences leur vient surtout de la surabondance des mérites de Jésus-Christ, dont l’efficacité, quoique affectée spécialement aux sacrements, n’y est cependant pas renfermée tout entière, mais s’élève au-dessus par son infinité. Or nous avons dit plus haut qu’on peut satisfaire en général les uns pour les autres; mais comme les saints n’ont point acquis pour tel ou tel en particulier cette surabondance de mérites qui se trouve en eux, puisque autrement ceux sur qui seroit reversée cette surabondance de mérites, obtiendraient indépendamment de toute indulgence la rémission des peines qu’ils auroient méritées, il s’ensuit que cette surabondance de mérites est acquise pour toute l’Eglise en commun, selon ce que disait l’Apôtre, qu’il “accomplissoit dans sa chair ce qui restoit à souffrir à Jésus-Christ, en souffrant pour l’église à laquelle il écrivoit, Colos., I, 24.
Or les biens qui appartiennent à toute une communauté, sont distribués à chacun de ses membres de la manière qu’il convient de le régler à celui qui en est le chef. De mème donc que tel ou tel obtiendrait la rémission de sa peine à expier, si c’était pour lui en particulier qu’un autre aurait satisfait, il doit l’obtenir également, si le chef de l’Eglise dispose en sa faveur des mérites surabondants de Jésus-Christ et des saints.” 2